Communiqué de presse
Washington, DC — La Commission interaméricaine des droits de l'homme (CIDH) publie aujourd'hui son troisième Rapport sur la situation des personnes défenseuses des droits humains dans les Amériques. Ce rapport fournit des informations mises à jour sur les progrès et les défis en matière de garantie des droits des personnes défenseuses, sur la base des observations formulées dans les rapports régionaux de 2011 et 2006.
Plus de treize ans après la publication du deuxième rapport sur la situation des personnes défenseuses dans les Amériques, la Commission constate avec préoccupation que celles qui défendent les droits humains continuent de le faire dans un environnement hostile où leur vie et leur intégrité personnelle sont constamment menacées.
La CIDH attire également l'attention sur la situation particulièrement dangereuse dans laquelle se trouvent les personnes défenseuses de la terre, du territoire et de l'environnement, ainsi que les dirigeants autochtones et d'ascendance africaine. Elle analyse également les risques spécifiques auxquels sont confrontées les femmes défenseuses et les personnes LGBTI en raison de l'intersection entre leur genre, leur identité ou leur orientation sexuelle et leur activisme, et observe les risques inhérents à la défense des personnes en situation de mobilité humaine.
Dans ce rapport, la Commission analyse pour la première fois la situation spécifique des personnes qui recherchent des personnes disparues et des personnes défenseuses dans des affaires liées à la mémoire, à la vérité et à la justice, ainsi que celles qui sont engagées dans la défense des droits sexuels et reproductifs.
Le document met en évidence la persistance de niveaux inquiétants de violence à l'encontre de ces groupes. Les risques vont des campagnes de dénigrement et des discours stigmatisants aux menaces, aux atteintes à leur vie et à leur intégrité, aux assassinats et aux disparitions. Malgré la gravité de ces faits, les crimes contre les personnes défenseuses demeurent largement impunis.
La criminalisation reste une pratique courante de la part d'acteurs étatiques et non étatiques pour entraver leur travail, ce qui a même conduit à l'exil forcé de nombreuses de ces personnes, ce qui constitue une forme de répression ayant un impact grave sur l'exercice du droit de défendre les droits.
La défense des droits humains se déroule dans un espace civique de plus en plus restreint, ce qui se traduit par des interventions et des surveillances illégales. En outre, des cadres législatifs ou administratifs ont été adoptés qui imposeraient aux organisations de la société civile des systèmes d'inscription plus stricts, limiteraient leurs domaines d'action et contrôleraient de manière disproportionnée leur financement, ce qui pourrait avoir des répercussions sur le droit d'association.
Par ailleurs, le rapport analyse les obligations des États au regard des normes interaméricaines en la matière et les mesures qui ont été adoptées pour les respecter, ainsi que les défis qui persistent. La Commission apprécie les efforts déployés par certains États de la région pour progresser dans ce sens, notamment par la création de mécanismes nationaux de protection, la volonté de se conformer aux mesures conservatoires émises par la CIDH et la mise en place de parquets spécialisés dans les enquêtes sur les crimes commis contre les personnes défenseuses.
Toutefois, la CIDH observe que certains défis persistent, tels que les faiblesses dans le fonctionnement adéquat des mécanismes nationaux de protection des personnes défenseuses, l'octroi de mesures de protection qui ne sont pas adaptées aux risques, et l'absence de progrès dans les enquêtes sur les crimes commis contre les personnes défenseuses, ce qui se traduit par des taux d'impunité élevés.
Dans son rapport, la CIDH présente un ensemble de recommandations aux États de la région afin de renforcer leurs efforts pour protéger et garantir les droits des personnes défenseuses, parmi lesquelles figurent notamment : l'élaboration de politiques publiques globales visant à protéger et à garantir les droits de personnes qui défendent les droits ; l'octroi de mesures de protection adéquates et efficaces, avec une approche différenciée et intersectionnelle, pour les personnes en situation de risque ; la poursuite des enquêtes sur les crimes commis contre ces personnes et la sanction de personnes responsables ; la prévention de la criminalisation et la révision, l'ajustement et/ou l'abrogation des dispositions pénales ou des cadres normatifs contraires au principe de légalité, qui sont fréquemment utilisés à cette fin.
Il est essentiel que les États adoptent et/ou renforcent les mesures nécessaires pour garantir que les personnes engagées dans la défense des droits humains puissent le faire dans un environnement exempt de toute forme de menace ou d'intimidation. La reconnaissance de l'importance du rôle que jouent les personne défenseuses dans toute société démocratique dépend en fin de compte de la détermination et de l'engagement des États à tous les niveaux et dans toutes les branches du pouvoir.
La CIDH est un organe principal et autonome de l'Organisation des États Américains (OEA) dont le mandat émane de la Charte de l'OEA et de la Convention américaine relative aux droits de l'homme. La Commission interaméricaine a pour mandat de promouvoir le respect et la défense des droits de l'homme et de servir, dans ce domaine, d'organe consultatif de l'OEA. La CIDH est composée de sept membres indépendants, élus à titre personnel par l'Assemblée générale de l'OEA et qui ne représentent pas leurs pays d'origine ou de résidence.
No. 211/25
11:00 AM