La CIDH exhorte les États à garantir les droits des personnes rapatriées, expulsées ou renvoyées

15 mai 2025

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Washington, DC — La Commission interaméricaine des droits de l'homme (CIDH) exprime sa préoccupation face à l'augmentation des pratiques de rapatriement forcé, d'expulsion et de renvoi de personnes migrantes et réfugiées, tant vers leur pays d'origine que vers des pays tiers, sans les garanties d'un procès régulier ni le respect de leurs droits humains. La CIDH exhorte les États de la région à adopter des mesures visant à garantir la protection intégrale des droits des personnes en situation de mobilité, conformément aux normes interaméricaines en la matière.

Au cours des derniers mois, la CIDH a reçu des informations faisant état d'une augmentation significative des rapatriements forcés, des expulsions et des renvois de personnes migrantes dans la région, qui se produiraient sans le respect des garanties minimales d'un procès régulier. Elle a également reçu de nombreuses dénonciations concernant le recours indiscriminé à la détention des migrants, leur placement à l'isolement et des cas de disparitions forcées de courte durée dans le cadre de procédures de départ involontaire ou forcé.

La CIDH observe que ces mesures s'inscrivent dans un contexte de politiques migratoires restrictives dans la région, marqué par des processus d'externalisation et de militarisation des frontières. Elle constate également une tendance à la criminalisation et à l'augmentation des discours haineux et stigmatisants à l'encontre des personnes migrantes et réfugiées.

La Commission est également préoccupée par la conclusion récente d'accords bilatéraux entre des États membres de l'OEA qui ont établi des mécanismes singuliers pour l'expulsion de ressortissants de pays tiers, qui se traduisent par des transferts de personnes qui ne bénéficieraient pas des garanties minimales d'un procès régulier et sans évaluation individuelle des besoins éventuels de protection internationale. Cela a créé des lacunes juridiques et en matière de protection qui affectent gravement les droits des personnes migrantes, réfugiées et de leurs familles.

Face à cette situation, la CIDH rappelle que, si les États ont la souveraineté d'établir leurs politiques migratoires et de réglementer l'entrée, le séjour et la sortie des personnes sur leur territoire, cette faculté doit être exercée dans le strict respect de leurs obligations internationales en matière de droits humains et de droit international des réfugiés. Cela inclut l'obligation de garantir un procès régulier à tous les personnes migrantes, quelle que soit leur situation migratoire, ainsi que le droit de demander et de recevoir l'asile.

La Commission souligne que toute décision de renvoi ou d'expulsion doit être individualisée, fondée sur une analyse motivée du cas concret et dans le plein respect du procès régulier. À cette fin, les États doivent garantir au minimum : i) une information adéquate ; ii) l'accès à une assistance juridique ; iii) des services d'interprétation et de traduction ; iv) la protection consulaire pour ceux qui peuvent et/ou souhaitent bénéficier de cette protection ; v) la notification formelle de la décision ; vi) un recours effectif pour la contester ; et vii) l'effet suspensif de ce recours. La CIDH rappelle que les renvois collectifs sont interdites par le cadre juridique interaméricain et constituent une violation manifeste des obligations des États.

La CIDH rappelle également l'obligation des États de respecter le principe de non-refoulement qui interdit de refouler une personne vers un pays où sa vie, son intégrité ou sa liberté personnelle risquent d'être violées. Ce principe constitue une norme impérative du droit international et ne peut faire l'objet d'aucune dérogation.

En ce qui concerne la détention migratoire, la CIDH souligne que la situation migratoire irrégulière ne saurait, à elle seule, constituer un motif de privation de liberté. Elle constitue essentiellement une violation d'une norme administrative, qui ne doit pas être considérée comme une infraction pénale, de sorte que la détention ne devrait pas être la première réponse de l'État. De même, dans les cas où la détention est applicable, le plein respect des garanties procédurales doit être assuré. Les personnes migrantes détenues doivent être informées des motifs de leur détention, des droits dont elles jouissent, ainsi que des mécanismes disponibles pour contester cette mesure. La Commission encourage les États à envisager des mesures alternatives à la détention et rappelle que la détention des enfants, des adolescentes et des adolescents n'est jamais dans leur intérêt supérieur.

La CIDH demande instamment aux États d'adopter une approche globale de la protection dans toutes les procédures de rapatriement, d'expulsion ou de renvoi des personne migrantes, comprenant : i) l'évaluation du risque de persécution ou de traitements cruels, inhumains ou dégradants dans le pays de destination ; ii) le respect du principe de l'unité familiale et de l'intérêt supérieur des enfants, des adolescentes et des adolescents ; iii) la fourniture d'informations claires sur les droits et les procédures ; iv) l'analyse des alternatives migratoires avant de prendre des décisions ; et v) la garantie du droit d'asile pour les personnes qui ont besoin d'une protection internationale.

Enfin, la Commission encourage vivement les États qui accueillent des personnes rapatriées, expulsées ou renvoyées, qu'elles soient ou non leurs ressortissantes, à mettre en œuvre des politiques et des programmes d'accueil, d'assistance et d'intégration socio-économique durables, notamment l'adoption de protocoles d'identification des profils nécessitant une protection spéciale, de mécanismes de suivi après le retour et la coordination entre les réponses humanitaires et les réponses en matière de développement. Ces mesures doivent viser à garantir des solutions durables dans les communautés d'origine ou de résidence. Elles doivent également garantir que les personnes qui ne peuvent pas retourner dans leur pays d'origine aient accès à la procédure d'asile.

La Commission rappelle en outre le caractère transnational de la migration et l'importance de la responsabilité partagée entre les États, ainsi que la nécessité de coopérer et de dialoguer pour protéger les droits humains de toutes les personnes migrantes, quelle que soit leur situation migratoire, conformément à la Résolution n° 04/19 sur les principes interaméricains.

La CIDH est un organe principal et autonome de l'Organisation des États Américains (OEA) dont le mandat émane de la Charte de l'OEA et de la Convention américaine relative aux droits de l'homme. La Commission interaméricaine a pour mandat de promouvoir le respect et la défense des droits de l'homme et de servir, dans ce domaine, d'organe consultatif de l'OEA. La CIDH est composée de sept membres indépendants, élus à titre personnel par l'Assemblée générale de l'OEA et qui ne représentent pas leurs pays d'origine ou de résidence.

No. 102/25

10:30 AM